À LA RENCONTRE DES MÉDIAS ASSOCIATIFS TUNISIENS

Comment créer et faire vivre des médias libres ?

Enquête de Marc OLLIVIER - (membre de la délégation du réseau RITIMO à Tunis)

Dans l’arrière pays, la jeunesse tunisienne est avide de donner la parole aux sans voix et aux régions marginalisées Pendant une semaine après la fin du FSM, j’ai effectué un petit circuit à l’intérieur de la Tunisie pour rendre visite à trois équipes de jeunes qui s’investissent avec enthousiasme dans le lancement de médias associatifs totalement libres. L’une, à Gafsa, a choisi la formule des blogs publiés sur internet. Les deux autres, à Regueb et à Kasserine, se sont orientées vers des web-radios, et celle de Regueb a déjà mis en place l’équipement nécessaire pour émettre dès que possible sur la bande FM. Dans les trois cas, les stages de formation se multiplient pour préparer et améliorer les compétences dans toutes les activités requises pour faire vivre et développer ces médias.

À GAFSA

L’association « Tunisie Bondy Blog » a créé à Gafsa un média en ligne qui a pour objectif de permettre aux jeunes issus des milieux populaires de pouvoir s’exprimer et de raconter la vie quotidienne de la région, loin de la stigmatisation et du sensationnalisme. Elle veut aussi leur permettre d’acquérir les bases d’un journalisme citoyen et de les préparer, s’ils le souhaitent, à devenir des journalistes professionnels.
L’association est soutenue financièrement par l’Institut culturel français de Tunis et par l’Union Européenne, et elle bénéficie d’une assistance technique pour les métiers du journalisme de CFI (Canal France International)
L’équipe est composée de jeunes contribuant régulièrement au blog par des reportages de terrain, qui partagent les mêmes valeurs : la solidarité, la recherche de la vérité, la mise en valeur du quotidien des habitants de régions populaires, le partage de connaissances. Ils suivent des stages de formation réguliers et habitent dans trois villes de la Tunisie profonde : Gafsa, Sidi Bouzid et Kasserine. L’adresse de ce média en ligne est < www.tunisiebondyblog.com >.
L’association a le projet d’éditer un document papier à 40.000 exemplaires pour présenter son blog en ligne et par la suite de publier un périodique papier trimestriel pour accompagner et faire connaître ses publications en ligne.
Le président de l’association est Adel ALIMI. Je l’ai rencontré avec un Français du réseau des « Bondyblogs », Paolo KAHN, et une étudiante de passage, Hélène SERVEL. On trouvera ici une INTERVIEW qu’ils m’ont accordée.

À REGUEB

Dans cette ville proche de Sidi Bouzid (35 km environ) se sont installés, au 2ème et dernier étage d’un petit immeuble du centre, les animateurs d’une web-radio créée par l’association « Liberté et Développement ».
L’adresse de ce média associatif est < www.radio3r.net >. Radio3r se réfère aux mots d’ordre de l’association : « Regueb - Revolution - Renouveau ».
Ses objectifs sont d’élargir l’accès à l’information de la population tunisienne, et de soutenir l’insertion et la valorisation sociales des jeunes Tunisiens de la région du Sahel. Cette association bénéficie également d’un soutien financier de l’Union Européenne ainsi que d’un appui matériel et technique de deux importantes ONG italiennes : COSPE, spécialisée dans l’aide au développement local dans de nombreux pays du sud, et AMISnet, spécialiste des équipements pour médias libres.
Cette association organise de nombreux stages de formation pour les jeunes qui se mobilisent pour assurer le fonctionnement de cette web-radio. Elle a décidé, grâce à l’assistance de ses partenaires italiens, d’installer tous les équipements nécessaires pour faire fonctionner une radio FM (studios d’enregistrement, émetteur et antenne d’une portée de 40 à 50 km). L’installation était en cours d’achèvement lors de mon passage, il ne restait plus qu’à obtenir une autorisation au moins temporaire, en attendant la mise en place d’une réglementation et d’une autorité compétente pour gérer les attributions des fréquences sur la bande FM...
J’ai pu rencontrer l’équipe sympathique engagée dans ce projet, notamment Abdesselam SAYAHI, Secrétaire Général de l’association, Hamadi Moujahed, responsable de la programmation, Debora DEL PISTOIA, chargée de la formation et Enrico SACCONE, venu depuis Turin pour installer les équipements FM. Ils ont accepté de m’accorder une INTERVIEW accessible ici.

À KASSERINE

C’est ici que la violence policière déclenchée par Ben Ali pour écraser le mouvement révolutionnaire tunisien fit le plus de victimes. Une ville proche de la frontière algérienne et marginalisée par rapport aux régions côtières. Comme à Regueb, un groupe de jeunes tunisiens ont décidé d’y créer une association pour lancer une web-radio sous le nom de "Houna el Gasserine" (ici Kasserine). L’adresse de ce média associatif est < www.radio-kasserine.tn >
Leur objectif est surtout de mettre en lumière les problèmes économiques et sociaux que rencontrent les habitants dans leur vie quotidienne, d’agir pour le désenclavement de leur région, et de populariser le rôle majeur qu’ils pensent pouvoir faire jouer aux "médias libres" dans la construction d’une démocratie nouvelle en Tunisie.
Ils sont associés à deux partenaires : une ONG canadienne et la région PACA, dans le cadre de la convention de coopération signée entre cette région française et la région de Kasserine. Cette jeune association a récemment préparé un dossier pour présenter son projet de compléter sa radio internet par une radio FM. Elle est à la recherche de partenaires pour son financement et pour former le personnel nécessaire à son fonctionnement.
Le siège de cette association et son studio d’enregistrement sont hébergés par le Centre de jeunes de Kasserine. C’est là que j’ai rencontré Saber RABHI, animateur de l’équipe de bénévoles qui font vivre la radio et Mejdi BOUROUIS, ingénieur du son, qui m’ont accordé une INTERVIEW.